" Les enfants de Bam "


J'arpente les tas de gravats d'un quartier du centre ville de Bam. Du fond du sol résonne une puissante détonation, elle remonte et me fait vibrer le corps.

Nous sommes en mai 2004, six mois après le tremblement de terre du 26 décembre 2003, qui fit 26000 morts et détruisit à 80% cette ville du sud- est de l'Iran.

Autour de moi, tout n'est que désolation et poussière. Cette réplique du séisme me laisse imaginer l'histoire des habitants du quartier. Je suis debout sur une maison devenue la tombe de ses occupants. Dès lors que l'on s'écarte du chemin, comment ne pas penser à toutes ces vies que l'on foule du pied.
Au détour d'une tente, une femme tient un enfant dans ses bras et regarde, tout comme moi auparavant, les restes de sa maison où sont morts ses quatre enfants. Elle pleure, la petite fille me sourit.

Alors que les parents se morfondent sur les trottoirs, les bras ballants, toute volonté de reconstruire anéantie par le poids du travail à accomplir et une administration réticente à accorder les autorisations, les enfants de Bam semblent être les premiers à re-sourire à la vie. Pourtant, les stigmates de la catastrophe sont bien présents, certains d'entre eux ont le visage sombre, l'air hagard, perdu dans l'incompréhension.
Mais Bam est devenu pour eux un immense terrain de jeu, où ils prennent le contrôle des voitures écrasées, tournent en vélo dans le fond d'une piscine éventrée, jouent à cache-cache dans les débris de leurs maisons…, leurs éclats de rire couvrent le bruit des bulldozers.

Ces photos sont un hommage à l'innocence de ces enfants rescapés et à la vie qui à travers leurs jeux, reprend le dessus.


© Ph. Rinjonneau